Les aventuriers de Darwin

La fin de l'aventure approche à grand pas et nous nous apprêtons à quitter la peau de roadtripeurs dès notre arrivée à Darwin. Comme le début du voyage, la fin n'est pas probablement pas le meilleur moment, non pas car l'aventure touche à sa fin, car nous nous y préparons depuis quelques temps, mais car nous nous apprêtons à vivre des moments riches en émotions, des émotions quelque peu différentes de celles vécues jusqu'à présent.

Pour nos proches, ce récit va être une découverte. Nous n'avons pas souhaité communiquer ces mésaventures auparavant car nous ne souhaitions pas les affoler. Maintenant que la situation est rétablie, il est temps de tout vous raconter. Mais avant, nous voulons aussi vous dire que nous avons toujours gardé le moral ainsi que l'état d'esprit australien « no worry », adopté depuis bien longtemps.

Après notre arrivée à Darwin, le lundi 17 juin 2013, les missions sont de se mettre à jour administrativement avant de quitter le territoire, à savoir auprès de la banque, des impôts et des assurances. Et l'objectif principal est de vendre le van, chose pas si facile en cette période où un tas de backpackers quittent le territoire et vendent donc eux aussi leur véhicule. Mais sur ce coup, nous serons chanceux car une amie d'enfance à Céline, Virginie et son ami Nicolas, démarrent leur aventure australienne à Darwin à ce moment là.

Virginie et Nicolas

Mercredi 19 juin, après quelques autres touches, dès la première visite, Virginie et Nicolas nous font une proposition que nous acceptons. Quel soulagement, cette première étape est faite. Il nous faut maintenant trouver un logement pour les deux semaines à venir. On met de côté l'idée du backpacker car trop cher : 241$/semaine/personne, soit un total de 960$, c'est hors de question. L'idée de louer un van nous semble intéressante mais le prix annoncé de 750$ et le confort nous font abandonner cette option. Nous cherchons donc une collocation et nous trouvons rapidement une chambre à louer dans le quartier de Coconut Grove, un nom qui fait rêver.

Vendredi 21 juin à 7h du matin, c'est la première aventure : réveil par les rangers qui nous mettent d'office un PV de 140$ chacun pour camping sur la voix publique. A Darwin, depuis que de jeunes backpackers français se sont amusés à insulter les rangers, nous n'avons plus droit à aucun avertissement. Le couple avec qui nous sommes, Laureen et Pilou, que nous avions déjà rencontré au Kings Canyon à 1500km de là et avec qui nous tissons de bons liens, en sont à leur deuxième prunes en deux nuits à Darwin. Ca fait mal ! Après s'être renseignés auprès d'amis, nous décidons de ne pas payer cette sommes. Nous devenons des hors la loi ! Une journée qui commence bien mais nous surmontons facilement ce coup dur. Dans l'après midi, après la visite de la chambre, Léo, le locataire, nous demande 4 semaines de caution + 2 semaines d'avance en cash. Avec un loyer de base de 250$/semaine, le total est de 1500$. Après quelques minutes de négociation, nous tombons le prix de la chambre à 200$ en échange de la préparation des repas du soir et seulement deux semaines de caution. Cette pratique est courante en Australie. Nous lui donnons donc 800$ contre échange d'une lettre signée justifiant que nous lui avons versé cette somme. La chambre doit se libérer le jeudi suivant mais nous tombons d'accord sur le fait de dormir dès le lundi soir sur le canapé du salon afin de donner le van à Virginie et Nicolas au plus tôt. Le soir, nous les invitons à venir dîner à la maison. Nous leur concoctons de bons fajitas, échangeons sur le voyage et partageons nos astuces de vagabonds. La soirée est animée par un feu qui se déclare à 100 mètres du parking où nous sommes installés. Cette propriété privée appartient aux aborigènes, les rangers n'y ont donc pas accès, c'est là que nous prévoyons d'y dormir. Le feu fini par s'éteindre de lui même et nous pouvons passer une nuit tranquille.

Le samedi nous allons voir notre premier rodéo à Noonamah, à 30km au sud de Darwin. Nous y allons avec Virginie & Nicolas ainsi que Hove & Gesa, un couple d'allemands avec qui nous sommes restés proches depuis la cueillette des pommes dans le New South Wales et qui sont de passage. On passe une super soirée et la découverte du rodéo est un grand moment. Ces cowboys sont vraiment couillus – excusez-nous du terme – pour monter sur ces jeunes chevaux et bœufs tous fous et qui ne mettent guère plus de 12 secondes pour éjecter leur cavalier. Et parfois avec une violence qui nous donne des frissons. Le spectacle est grandiose. Organisé par la taverne de Noonamah, une roadhouse de l'Outback, cet événement rassemble environ 500 spectateurs qui assistent au show des cowboys mais aussi à des sauts à moto, des combats de boxe et au concert de fin de soirée. Tout est là pour une soirée inoubliable ! Dimanche, nous profitons de la piscine de l’hôtel de Virginie et Nicolas ainsi que de leur douche. Bonne nouvelle, Léo nous prévient que la chambre se libera le lendemain.

            

            

Lundi 24 juin, nous vidons Gingle, notre van, et déposons nos affaires dans la maison en fin d'après midi. Par manque de confiance vis à vis de Léo, que l'on trouve étrange cette après midi, nous préférons passer la dernière nuit dans le van pour éviter que ce dernier ne disparaisse. Léo nous informe également qu'il vient de trouver un nouveau travail de chef cuisinier dans une mine du Western Australia et qu'il doit partir samedi. Il nous confirme qu'il nous rendra nos deux semaines de caution, samedi avant de partir. Nous rejoignons Laureen et Pilou pour une soirée pleine de rire sur le site autorisé par les rangers : le parking des camionneurs situé le long de la Highway, la voix rapide qui conduit à Darwin. Le lendemain, il est l'heure de faire le changement de propriétaire et de faire nos adieux à Gingle. Dur dur de réaliser à ce moment là la situation. D'autant plus que nous allons certainement le recroiser dans les jours à venir. C'est à leur tour de passer leur première nuit de roadtripeurs et nous leur souhaitons beaucoup de bonheur pour ces beaux moments à venir.

Changement de propriétaires pour Gingle

Mercredi matin, ils se font arrêter par la police pour ceinture non attachée - PV annoncé de 400$ chacun, mais dont ils leur font cadeau pour ne pas gâcher leur début de voyage. En contre partie, ils leur annoncent que le van n'est pas en règle car soit disant pas enregistré et leur enlèvent les plaques d'immatriculation. La galère commence et nous allons tenté de les aider. Arrêtés à 8h du matin, la situation ne se dénouera qu'à 15h. 7 heures qui nous paraissent interminables et au cours desquelles tous les scénario sont imaginés. Après s'être rendus dans un premier temps au bureau des véhicules, nous comprenons que le van est en règle, mais la base de données utilisée conjointement par la police et le service des véhicule n'a pas été mise à jour depuis 2009 par le Western Australia, l'Etat où il est immatriculé. La seule solution que l'on nous propose est de faire ré-immatriculer le véhicule, ce qui implique de passer un contrôle technique : chose complètement improbable pour un van comme celui-ci non contrôlé depuis des années... En insistant un peu, on fini enfin par faire mettre à jour les données, ce qui peut prendre jusqu'à 7 jours. Encore trop long, nous décidons de nous rendre au poste de police central de Darwin pour qu'ils nous rendent les plaques. Après leur avoir ré-expliquer l'histoire, à 14h30, un policier rétabli la situation. Il nous conduira au van dans son véhicule de police, Céline à côté de lui, Virginie et Nicolas à l'arrière et Flavien dans le caisson à l'arrière du véhicule dédié au transport des prisonniers – à mourir de rire d'ailleurs. Céline et Virginie se rendent au plus vite au poste de police concerné et récupèrent les plaques en deux temps trois mouvements. Cet inspecteur de police nous laissera une image plus que positive avec son attitude no worry, son aide et son sourire. Finalement cette aventure se finie bien et nous pouvons en rire.

            

En ce qui nous concerne, la colocation se passe bien même si des choses étranges se passent ici. Nous vivons avec deux japonais qui louent une chambre, une coréenne qui dort sur le sofa, Léo et la locataire officielle, Lise. Cette dernière est une australienne de 20 ans, elle dort sur un matelas à l'arrière du sofa dans le salon avec ses valises à ses pieds. Elle est étrange et est dans sa bulle. Sa vie ne semble tourner qu'autour de ses chiens, au point que la communication est difficile, et elle ne gère absolument pas sa maison. Léo, le pseudo colocataire, est un australien d'origine philippine. Il est de plus en plus étrange et tente d'imposer des règles qui n'ont aucun sens. Il nous raconte à tous des histoires différentes à son sujet, semble faire des trafics pour de l'argent, va même jusqu'à nous demander de lui prêter 1000$ en gage de son collier... Nous prenons ceci dit nos marques et apprécions drôlement d'avoir une chambre pour nous avec un grand lit, une salle de bain, une cuisine, un salon et un jardin... même si nous espérions une collocation un peu plus fun.

Jeudi soir, Léo fait ses valises pour aller rejoindre sa mère qui lui rend visite avant qu'il ne s'en aille et dit à chacun d'entre nous qu'il reviendra le lendemain pour tout régler avant de partir définitivement pour son nouveau travail.

Vendredi 28, on profite d'un petit déjeuner en amoureux et passons le gros de la journée dans les papiers. Ainsi nous pourrons profiter pleinement des jours à venir à Darwin. MG, la coréenne, attend Léo depuis 11h pour récupérer sa caution. En début d'après midi, quatre irlandais arrivent dans la maison pour récupérer la chambre de Léo et devinez quoi... la nôtre aussi ! Les premières questions se posent. En très peu de temps, après maints échecs pour contacter Léo, un nouveau couple d'australiens arrive pour aménager le soir même. On comprend que Léo vient de tous nous escroquer. A ce stade, nous sommes dix personnes à avoir payé cash, plus de 6700$ au total. On croit être dans un mauvais rêve. Très honnêtement, je crois que nous nous y préparions depuis quelques jours car la situation sentait trop mauvais. On vient de se faire berner et avons perdu 400$ comme deux gros cons. Pour les autres c'est encore pire, ils ont tous versé 1500$ et n'ont nul part où dormir contrairement à nous. Cette situation est incroyable, le sentiment à ce moment là est comme irréel et un gros nœud se noue dans notre estomac. A force de poser des questions à Lise, on se rend également compte qu'elle a un problème mental ! Léo était là seulement depuis six semaines, il payait pas le loyer, avait sa propre chambre, et c'est lui qui gérait la sous location. Lise ne connait même pas son nom de famille. La tension monte dans la maison et tourne au cauchemar. Après s'être fait insulté par l'australienne, Lise qui ne réagissait à rien jusqu'à présent, sort de ses gonds et saute sauvagement sur la fille. La bagarre éclate entre le couple et Lise, qui jettera un objet en verre sur eux. C'est l'affolement général. Tout le monde sort dans la rue et Lise poursuit le couple avec une seringue remplie de je ne sais quel produit. C'est une vraie scène d'horreur de cinéma. Tout le monde cri et panique jusqu'à ce qu'un des garçons assomme Lise dans sa voiture qui fini par s'injecter le contenu de sa seringue. On voit à ce moment qu'il s'agit d'insuline pour diabétique. Elle rentre dans la maison juste avant que la police n'arrive. Après une seconde injection, elle se débat et mort la police. L'ambulance vient la chercher peu après car elle est affaiblie et nous pouvons enfin discuter de la situation avec la police. Nous savons que Lise rentrera dans quelques heures et nous devons décider si nous restons ou non. La peur d'une folie meurtrière nous fait réfléchir à deux fois. Nous savons que Lise est devenue folle après insulte et qu'elle n'est pas capable de préméditer quoi que ce soit. Nous attendons son retour pour voir son attitude et prendre une décision. Une fois rentrée, elle est calme, probablement shootée par les médicaments et les émotions. Le couple d'australien est reparti, nous sommes encore neufs individus et décidons de rester cette nuit dans la maison. A 800$ les deux semaines, nous ne voulons pas dépenser plus d'argent. La nuit est loin d'être sereine mais se passe normalement.

Samedi matin, l'atmosphère est particulière. Lise est étrange. Tel un zombie, elle passe la journée à se triturer avec des seringues devant nous et à dormir. C'est avec un visage très blanc et des yeux dans le vide qu'elle va se coucher dans la chambre de MG. Vers 11h du soir, nous sommes réveillés par des cris étranges. C'est MG qui vient de rentrer de son travail et qui a retrouvé Lise allongée par terre près du lit. Elle est inconsciente et respire par saccades. L'ambulance arrive rapidement et l'emmène d'urgence à l’hôpital, elle est dans le coma. Nous retentons de retrouver le sommeil difficilement. A 3h du matin, la police vient nous annoncer le décès de Lise qui s'est infligée une mort lente à l'insuline. Nous comprenons soudainement ce qu'elle faisait devant les yeux de tous dans la journée. Cette fin est très dure ! La police entame immédiatement une enquête pour déterminer les causes de la mort. Mis à l'écart sur la terrasse, nous sommes interrogés jusqu'à 6h du matin et la maison est inspectée. A ce stade là, il est encore difficile de réaliser ce qui vient de se passer.

Après cette nuit d'horreur et de drame, le dimanche 30 juin est très calme dans la maison. Nous apprenons, après la visite de l'inspecteur, que le Léo en question a 7 identités connues à ce jour et a déjà sévi dans le New South Wales. Peut-être a t-il déjà quitter le pays. Nous nous doutons que nous ne pourrons pas rester jusqu'à notre départ dans la maison et réfléchissons à de nouvelles solutions.

Dès le lundi matin, la propriétaire accompagnée de l'agent immobilier viennent nous prévenir qu'il faut quitter le lieux sous 24 heures, soit mardi à 10h. Une heure plus tard, l'agent immobilier accompagné de la police et du serrurier nous demande gentiment de quitter les lieux sur le champs. C'est l'affolement dans la maison. Pour nous deux, qui devons rassembler tout notre bazar, l'épreuve est rude. Les mains tremblantes, nous faisons nos sacs à vitesse grand V et entassons le tout dans un chariot de supermarché qui traine dans le coin. L'aventure de la Belle et le Clochard commence ici... c'est un vrai gag. Mais no worry, nous sommes en Australie.

La Belle et le Clochard

A ce stade, il nous reste encore une semaine à vivre en Australie et il est encore hors de question de payer un logement après avoir finalement réellement perdu 600$, l'équivalent de la caution et d'une semaine payée pour rien. Dans notre malheur, nous avons la chance d'être bien entourés sur Darwin. Nous faisons appel à Laureen & Pilou et Virginie & Nicolas. Laureen vient nous récupérer rapidement devant le portail. Son 4x4 est tellement rempli qu'il y a juste la place pour nous trois. Nous ne sommes donc pas à la rue... enfin façon de parler... car pendant 7 nuits nous allons dormir au bord de la Highway avec Laureen et Pilou qui nous prêtent leur tente et matelas gonflable. Nous passons la soirée à Est Point, sur la plage pour assister aux centaines de feux d'artifices tirés toute la nuit. Le 1er juillet est en effet la fête du Territoire du Nord et la tradition est que chacun tire son feu. C'est certes très beau, mais les risques sont grands car il n'y a vraiment aucune règle de sécurité appliquée. D'ailleurs, certains pétards nous arrivent dessus.

Laureen et Pilou, nos sauveurs

Mardi 2 juillet, le compte à rebours commence car nous n'avons plus qu'une hâte : quitter l'Oz, ou plutôt quitter Darwin. Pendant quelques jours, nous avons le 4x4 pour la journée car Pilou travaille et Laureen est parti visiter Katherine avec des amis. Nous nous occupons de fabriquer une table et de trouver un nouveau matelas mousse pour leur véhicule. Nous devrions être tranquilles jusqu'à notre départ mais mais les problèmes continuent à s'enchaîner d'une part pour Virginie et Nicolas qui après avoir fait contrôler le van par Andy, un jeune mécano belge, vont devoir changer un roulement du train arrière, et d'autre part Laureen et Pilou s’aperçoivent suite à une fuite qu'il ont le même problème sur le 4x4. A croire que Darwin est porteuse de poisse. L'ambiance n'est pas à la décontraction et tout le monde est sur les nerfs. Un sentiment de culpabilité nous envahi par rapport à Gingle qui jusque là roulait sans aucun soucis. C'est malheureusement le jeu communément rencontré avec les vans. Le van reste bloqué du samedi jusqu'à notre départ. Nous vivons donc à six avec le 4x4 de Laureen et Pilou qui attendent leur tour et passons les nuits au bord de la voie rapide avec le véhicule et deux tentes. Voilà trois semaines que nous sommes arrivés tous les six dans cette ville, cette dernière semble ne pas vouloir nous laisser partir... L'atmosphère ici n'est absolument pas représentative de l'Australie car on se sent oppressé par notre nationalité française, très mal perçue. C'est bien la seule fois où nous nous sentons chassés à cause de comportements irresponsables de quelques jeunes cons n'ayant aucun respect. Ce qui nous laisse croire que le paradis australien pour les français pourrait toucher à sa fin d'ici quelques temps.

             

Course de bateaux en canettes de bières

            

dernière soirée de camping

Lors de notre dernière nuit, dimanche 7 juillet, Nous nous paierons le luxe d'un backpacker et pour que la boucle soit bouclée, nous dormirons comme nos premières nuits à Perth en dortoir dans un petit lit.

Bien que ces derniers jours eut été très pesants, nous remercions Laureen et Pilou pour nous avoir dépanner et souhaitons un bon rétablissement à Gingle afin que Virginie et Nicolas démarrent leur roadtrip comme il se doit. Bonne aventure à vous quatre and see you in France...

Cette fin de voyage très particulière facilitera nos adieux à l'Australie et motivera notre départ pour Bali. L'Australie se termine pour nous le lundi 8 juillet 2013 en fin de journée à l'aéroport de Darwin. Ce voyage a été une expérience extrarodianire. Maintenant place à l'Indonésie avec sa culture, ses plages, ses rizières, ses volcans, ses temples, sa gastronomie et tant d'autres choses à découvrir !